C'est le premier pays, parmi ceux où
nous avons déjà voyagé, où les régimes
de bananes ne sont pas enfermés sur les arbres, dans
de grands sacs bleus.
Nous remarquons des clôtures en bambous autour des maisons,
chose rare à Madagascar. C'est pour éviter que
la volaille ne s'éparpille et ne soit volée.
Dans le ravin, deux hommes coupent des feuilles d'arbres du
voyageur, poussés naturellement et qui n'appartiennent
à personne. Ils les feront sécher et les vendront
sur le marché, pour la construction de maisons.
Les cyclones
Lors des cyclones les plus forts — il y en a trois
à cinq par an, mais pas tous de la même intensité
— les maisons en bois s'envolent. Celles en latérite
résistent bien, mais voient souvent leur toit en
chaume soufflé. Les gens plus riches possèdent
des toits en tuile ou en fibrociment.
Le cyclone Geralda se révéla particulièrement
violent en 1992, ravageant 80 % de la côte nord-est
de l’île et inondant Tana. |
A Ifanadiana, les habitants font sécher
le café, sur la route, devant les plantations de caféiers.
Une fois sec, il faudra piler les coques, pour en extraire les
grains qui seront grillés plus tard.
Ce café sera vendu par chaque petit récoltant
(qui peut n'avoir par exemple que 5 kg de café à
vendre), à la ville proche, où il sera collecté
pour être grillé et exporté. Sur le bord
des routes sèchent aussi les récoltes de haricots.
Arrivés vers midi au Setam Lodge à Ranomafana,
rencontre sympa, nous retrouvons Dominique et Jean Pierre qui
déjeunent sur la terrasse. Nous nous joignons à
eux pour le repas. Après quoi, ils partent pour Antsirabe.
De notre côté, nous allons d'abord nous promener
au village, Hary en profite pour téléphoner. Sur
les trottoirs se dressent des guérites où on peut
téléphoner ou recharger son portable quand on
n'a pas d'électricité chez soi.
En fin de journée, nous partons pour la visite de nuit
du parc, où nous rencontrerons tout à tour, des
microcèbes (lémuriens nocturnes très petits),
toute une ribambelle de caméléons de petite taille,
verts ou marrons et des grenouilles arboricoles.
Samedi
22 octobre
Dès 8 heures, nous entrons dans le parc à la flore
abondante. ll faut crapahuter dur pour apercevoir les animaux
dans les arbres. Nous marchons souvent à flanc de montagne,
et devons franchir de nombreux dénivelés. Nous
apercevons d'abord des lémuriens à ventre roux.
Le mâle a des taches blanches autour des yeux, tandis
que la femelle a le ventre blanc. Un bébé est
accroché sur son dos. Mais il n'est pas facile de les
photographier entre les branches. Plus loin, des lémuriens
à front roux nous regardent, accrochés à
des troncs d'arbres, la tête des mâles est rousse
et celle des femelles marron.
Nous ne verrons pas d'autres sortes de lémuriens, sans
doute aurait-il fallu aller plus loin et plus haut, mais la
suite du parcours nous paraît trop abrupte.
Nous sommes de retour au lodge vers 11 h 15, après cette
très difficile marche jusqu'au sommet de la montagne,
en montée et descente permanente, dans la forêt
humide et chaude, sur la terre glissante, à franchir
des marches de terre d'une quarantaine de centimètres,
maintenues par des rondins ou des racines, à se baisser
sous les branches, un serpent qui glisse silencieux (aucun n'est
venimeux à Mada), à escalader le flanc de la montagne
glissante, à se tenir aux branches...
Pfff ! On n'a plus 20 ans !
La douche est régénératrice et le repas
sur la terrasse face au massif forestier reposant. Heureusement,
cet après-midi, on roule. Repos !
Au milieu de la photo, l'entrée du parc vue depuis le
sommet où on a grimpé.
La route qui mène à Ambositra
s'enfonce dans la forêt. Devant nous, traverse un bébé
fossa, d'un joli roux avec une queue en anneaux de deux couleurs.
C'est un carnivore, le prédateur des lémuriens.
Bientôt, nous retrouvons les magnifiques paysages de rizières
que nous n'avions plus vu depuis le train. Nous roulons de nouveau
sur la N 7, qu'on avait quittée à Fiana.
Ambohimahasoa... Nous parcourons le marché, mais à
14 h 30, c'est presque la fin. Les vendeurs sont là depuis
5 h 30 ce matin. Nous ne restons pas longtemps, car après
deux ou trois "vazaha" goguenards, Hary nous explique
que les hommes ont bu. Ils viennent vendre leurs produits pour
gagner quelques sous et les boivent aussitôt.
A Camp Robin, nous croisons deux charrettes à bras remplies
chacune d'au moins un mètre cube de briques, que deux
ou trois personnes poussent sur la route.
A Ambositra, nous logeons au Tourmania, un hôtel très
moche situé dans une rue populeuse, avec une chambre
minuscule, donnant sur une arrière-cour. Rien à
voir avec les lodges aux jolis jardins paisibles des étapes
précédentes. Nous ressortons dans la rue, le marché,
la rue noire de monde. Les gens et les enfants sont sales, les
étals crasseux, les légumes poussiéreux...
Odeurs indescriptibles de poisson pas frais, détritus
divers, vêtements lourd de crasse...
Nous faisons visiter notre chambre à Hary et en retour
il nous montre la sienne, plus grande que la nôtre mais
avec plusieurs lits, un dortoir pour les chauffeurs en fait.
Dimanche 23
octobre
Sur le bord de la N 7, que nous suivons en direction de Tana,
les gens marchent vers la ville, chapeautés, endimanchés,
ils vont à la messe, en jupes et chemisiers colorés.
Nous longeons une rivière aussi rouge que la terre.
A Antsirabe, les costumes sont tout aussi pimpants, mais on
voit très peu de chapeaux. Seuls les conducteurs de pousse-pousse
gardent leurs habits du quotidien, poussiéreux, usés
par les courses. Cependant, quelques uns, rares, portent de
jolies tenues.
La ville avec ses passants bien mis, offre un autre aspect qu'à
notre premier passage, la campagne également. Dimanche,
la messe, c'est une cérémonie !
Nous nous dirigeons maintenant par une piste défoncée
vers le lac Tritriva à une dizaine de kilomètres
de là. Le long de cette route, la brique est reine, maisons
(rarement recouvertes d'un enduit), murets et églises
sont construites en briques. Charrettes à zébus
remplies de choux, de foin, de branches, chariots couverts façon
Far West, piste rouge invraisemblablement cabossée et
partout "vazaha". La plupart des maisons, par ici,
sont couvertes de tôles ou de tuiles. Les vélos
transportent de longs fagots de bois, des bottes de foin, parfois
ils tirent une charrette.
Le lac Tritriva (1700 m), superbe lac émeraude
dort dans son écrin, un cratère de type strombolien,
de 146 mètres de profondeur. C'est le fils de Cousteau
qui l'a mesuré. Sur les rives, le sol en pouzzolane,
ajoute de la couleur au décor. Aucun poisson ne peut
y vivre à cause des émanations volcaniques, mais
un couple de poules d'eau en est le gardien. Leurs petits émigrent,
de sorte qu'il ne reste toujours qu'un seul couple à
Tritriva. La vue s'étend loin jusqu'au village et sur
les parcelles d'orge.
Après un arrêt à l'église, où
les gens sont restés à manger des petites choses
vendues sur les étals dressés sur la place, nous
reprenons la même piste. Match de foot, rouges contre
blancs, sur un terrain au milieu de rien.. Les spectateurs regardent,
assis par terre, tout autour. Sur un chemin transversal, défile
une longue colonne de gens, dans leur plus bel habit, rentrant
de l'église. Un peu plus loin, la foule, assemblée
autour d'un combat de coq, forme un carré de couleurs
vives au milieu du terre-plein rouge.
Après un très bon déjeuner, nous nous dirigeons
vers Tana.
Les voitures
A Mada, toutes les voitures qui circulent sont importées
d'Europe, d'Asie... Notre 4x4, par exemple vient d'Allemagne,
il est arrivé il y a six mois. Les gens les achètent
parfois sur le site d'annonces français "Le
bon coin" depuis les cybercafés et les font
transporter par bateau. Elles arrivent à Tuléar.
Peu de voitures roulent à Mada, pourtant des embouteillages
monstres paralysent Tananarive (5 km en une heure). Le
parc automobile s'accroît peu à peu, car
il y a de plus en plus d'importations et parallèlement,
on ne jette jamais les vieilles voitures à la casse
(d'ailleurs il n'y a pas de casse sur l'île). On
les répare sans cesse. Par exemple, récemment
une voiture a été écrasée
sous un container, pourtant le garage avec rien d'autre
que des marteaux et burins, l'a remise en état.
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Après un court bricolage de la batterie,
suite à un arrêt-photo — suffit de coincer
une vis entre deux fils — nous repartons pour nous arrêter
un peu plus loin, devant un groupe folklorique qui chante et
danse pour animer le dimanche à la campagne. Les femmes
en costumes de nylon rose vif et les hommes en tenues rouges,
coiffés de chapeaux de paille, chantent des chansons
traditionnelles, (des Hira Gasy), devant quelques bancs de spectateurs.
Ailleurs, de grosses marmites noires mijotent sur des feux de
bois, au bord de la route, elles servent à faire bouillir
des épis de maïs doux qui sont ensuite vendus aux
promeneurs.
Nous dépassons Tananarive où nous reviendrons
ce soir. Sur la N 2, les bords de route sont en fête,
ici un match de foot, là un combat de coq, ici un autre,
ailleurs plusieurs grandes tentes abritent des buvettes pour
le week-end. Nous passons devant le quartier où habite
Hary, hors de la ville, sur une petite colline, près
de la rivière Ikopa. Celui-ci nous a proposé de
nous montrer les villages du Père Pedro.
Le père Pedro
Ce prêtre missionnaire Italien, arrivé à
Tananarive en 1989, pour diriger un séminaire,
se rend sur la décharge de Tana pour vivre aux
côtés des habitants les plus déshérités.
Il fonde une association (Akamasoa qui signifie "les
bons amis") dont les objectifs sont de donner aux
populations les plus pauvres, un logement décent
qu'elles contribuent à édifier, la scolarisation
des enfants et un travail rémunéré.
Akamasoa a créé autour d’Antananarivo
18 villages où se sont installées 2926 familles
(15560 personnes)venues de taudis, de la rue ou de la
décharge de la capitale et qui vivent actuellement
de leur travail.
Le père Pedro utilise ses talents d'architecte
pour faire les plans des maisons que les gens vont construire.
Il les aide à se procurer les matériaux
ou à fabriquer les briques, grâce à
l'argile qu'on peut récupérer dans le sol.
Au début, il a secouru les personnes qui triaient
dans la décharge de Tana et les a aidés
à se construire leur maison. Ensuite, il est allé
ramasser les sans-abris un peu partout et les a réunis
sur la colline qui porte son nom. On trouve ici deux villages,
possédant dispensaire, maternité, école.
L'un des villages situé sur la colline du père
Pedro à Tana, s'appelle Andralanitra, du nom de
la décharge près de laquelle il a été
construit. Lui-même vit dans ces quartiers.
Grâce à son esprit humanitaire, il est parvenu
à mobiliser l'aide du monde entier derrière
son projet. Aujourd'hui, c'est toute une colline qui s'est
couverte de ces maisonnettes coquettes.
Sur un mur, est peinte la devise: "NY ASA NO MAHA
OLONA", c'est le travail qui fait l'homme ! |
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