Haute Provence
- 2009
En
Caravane
Vendredi 1 mai 2009
Partis de Normandie hier soir vers 18 h 30, avec la caravane,
nous avons dormi en route et roulé toute la journée
pour atteindre en fin d'après-midi les Alpes de Haute
Provence.
Cette fin de parcours nous dévoile un superbe paysage.
Entre Grenoble et Sisteron, nous roulons dans un sillon riant
entouré de hautes montagnes. Le vert-printemps des prairies,
le jaune des coucous et des fleurs de pissenlit, les arbres
blancs de fleurs et les branches parées de tendres feuilles
nouvelles-nées, offrent un premier plan radieux aux versants
couverts de sapins foncés et couronnés de sommets
encore largement enneigés.
Vers 19 h 30, juste avant le village de Volx, nous bifurquons
sur une petite route en direction de Niozelles et nous arrivons
à la ferme du bas-chalut, à Forcalquier. Nous
nous installons au bord de la rivière, dans une prairie
d'herbes hautes.
Après le dîner, nous établissons le programme
approximatif de nos balades pour la semaine, petits villages
perchés, promenades à pied, marchés et
autres activités… Tout cela s'affinera ou se modifiera
au jour le jour.
Samedi 2 mai
Se lever sous un ciel bleu est un réel plaisir. Après
l'approvisionnement au super-marché de Forcalquier, nous
déjeunons dehors, dans ce petit coin de prairie où
nous sommes presque seuls, il y a juste une petite tente, un
peu plus loin.
Après quoi, nous partons pour Banon avec une première
pause-photo à la retenue de Laye, aux paisibles eaux
vertes, dominées par une grande Bastide en pierre.
La route serpente entre les forêts aux
tendres feuilles et la campagne reverdissante peuplée
de chèvres, moutons, chevaux, ânes, vaches. Les
champs de lavande sortent à peine de leur grisaille d'hiver
et laissent à l'imagination le soin de les rêver
en bleu pour cet été.
BANON
Après avoir garé la voiture, au coeur de ce village
de charme, pour en découvrir les moindres recoins, nous
descendons par une rue en pente jusqu'à la place de la
mairie située un peu en contrebas. J'aime le dépouillement
de cette placette, avec son foyer rural à gauche, et
au fond, son petit collège de campagne aux volets en
bois, clos pour les vacances, à droite duquel s'étale
un gros buisson de lilas violets.
A l'aplomb de ce bouquet parfumé, on
découvre le vieux village par-dessus les toits de tuiles
romaines. Que ce collège rural semble loin de l'agitation
des structures scolaires citadines, modernes et surpeuplées
!
Après avoir contourné le bâtiment, nous
remontons jusqu'à la rue principale de Banon... colorée
de parasols et de volets pimpants... animée de terrasses,
café des voyageurs, café de France... bordée
de quelques boutiques, boulangerie, librairie des Bleuets, épicerie
avec ses fromages de pays... et dotée d'une fontaine
ronde plantée sur la place qui sert aussi de parking.
Nous grimpons à pied dans le calme
de la rue de la Bourgade, puis dans les calades restaurées,
jusqu'au portail majestueux qui donne accès aux ruelles
pavées et aux remparts. Par endroits, subsistent des
façades médiévales, tandis que l'église
haute à laquelle on accède par la rue du Four
Banal, domine l'ensemble.
Dans la rue des Arcades, les maisons sont construites sur les
remparts d'où l'on découvre une belle vue sur
la vallée. La balade à travers les vieilles pierres
chaudes est plaisante, d'autant qu'elles abritent encore la
vie. En redescendant, nous profitons de belles échappées
sur les toits et sur l'ensemble du village. C'est de l'authenticité
que vient la beauté de ce petit bourg dont nous avons
apprécié le silence et la paix, particulièrement
en cette saison où nous avons rencontré assez
peu de visiteurs.
A Banon, la spécialité c'est
le... "Banon". Nous avons eu le plaisir de goûter
cet excellent fromage de chèvre, crémeux à
souhait, qui à la fin de sa maturation est enroulé
dans des feuilles de châtaigniers, où il développe
goût et arôme subtil.
ONGLES
Grimpette au soleil sur un chemin de pierrailles jusqu'aux ruines
de la Vière. Le sentier est piqué de plantes de
garrigue, de thym commun odorant et de fragile thym citron,
dont je cueille un petit bouquet pour le barbecue de ce soir.
Les cigales crissent sous les branches maigres des arbustes
rabougris, les cailloux croulent sous nos pas, les fleurs de
rocaille parfument l'air chaud, un bouquet de lilas foncé
que les fleurs à peine écloses teintent de nuances
plus claires, se balance dans un souffle d'air.
Sur la route qui nous emmène ensuite
à Saint Etienne des Orgues, une haute montagne enneigée
se profile sur fond de verdure. A Saint Etienne, comme à
Banon ou à Ongles, c'est une profusion de lilas. Des
rues aux noms évocateurs, "les Andronnes",
"place vieille", "place de la bascule",
quelques bancs à l'ombre des platanes et des tilleuls,
des villageois assis en rond qui devisent sur le pas de leur
porte et nous expliquent que l'anneau planté dans une
poutre de la maison servait à monter le foin au temps
des chevaux... et le tableau est brossé !
En fin de journée, nous regagnons notre ferme peuplée
de biches, chevaux, lapins et volaille, et après une
petite pause au soleil sur nos fauteuils de toile, Jean Paul
s'occupe de notre mini-barbecue, tandis que j'égratigne
ma guitare. La nuit paisible tombe.
Dimanche 3 mai
Ce matin, accompagnés par la musique des oiseaux sur
la magie du silence, nous montons par un chemin empierré,
fleuri de lilas, de boules de neige et de glycines jusqu'à
la citadelle de Forcalquier. La chapelle Notre Dame de Provence
surplombe la vallée et déroule à ses pieds
une vue à 360 degrés sur les environs. Sur la
terrasse a été construit un carillon musical dont
les cloches furent fondues par "Paccard" d'Annecy,
les premiers fondeurs du monde. A midi moins le quart, arrive
le carillonneur qui, durant 45 minutes, va jouer au-dessus de
la ville le concert du dimanche matin. Suivant une partition,
il frappe sur des manettes disposées comme les touches
d'un clavier et reliées aux différentes cloches
accordées par demi-ton du si bémol grave au mi
bémol aigu, auxquelles ne manquaient à l'origine
que le fa# et les deux do#, manque réparé en 1999,
par l'ajout de trois cloches, ce qui en porte le nombre à
dix-huit.
Le déjeuner dehors, à une dizaine
de mètres de la rivière et des grands arbres qui
frissonnent dans le vent tiède, dans l'odeur de l'herbe
fraîchement fauchée, coupe agréablement
la journée. Repas froid obligé sous ce beau soleil
de mai ! Nous avons décidé d'aller, cet après-midi,
faire une grande balade à pied dans les Mourres. Le sentier
débute près de l'école de musique de Forcalquier
et monte raide. Une halte de-ci, de-là, nous permet d'admirer
la vallée verte, les versants boisés, tandis que
chantent les clarines des moutons un peu au-dessous du chemin.
Le sentier rocailleux s'élève à travers
un fouillis végétal intense, fleurettes, buissons,
plantes aromatiques, arbustes que je prends plaisir à
débusquer, moi qui suis passionnée par tout paysage
naturel, tableau artistique subtilement dessiné par la
nature généreuse quand on ne la massacre pas.
Cette région, mélange de la douceur de vivre méditerranéenne
et des dernières rudesses alpines, offre à profusion
plantes et fleurs, multitude de couleurs tendres sur des déclinaisons
de vert infinies.
Chemin faisant, le regard papillonnant de fleur en buisson,
nous avons dû rater une bifurcation, car nous n'avons
pas vu les rochers tourmentés des Mourres. Mais après
deux bonnes heures de montées et descentes, nous n'avons
pas le courage de retourner en arrière. Nous reviendrons
un autre jour, en nous approchant avec la voiture par une petite
route que nous avons repérée en route.
Vers 16h30, nous nous dirigeons vers le nord, jusqu'à
la montagne de Lure, qui culmine à 1826 mètres
d'altitude. Cytises, genêts, lilas, tamaris, iris, thym,
marronniers, oliviers, ifs, sapins, mahonias et les autres dont
je ne connais pas le nom, se disputent la place sur les talus
et les flancs des coteaux. Mais au fur et à mesure qu'on
s'élève, les conifères envahissent tout
l'espace. A la station de Lure, subsistent quelques plaques
de neige et la route qui monte au col est barrée. Il
y fait froid, saisissant contraste avec la vallée. L'endroit
est abandonné, seuls quelques remonte-pente témoignent
d'une activité hivernale. Maintenant il pleut, des orages
éclatent un peu partout dans la montagne, nous rentrons
à la caravane... Aujourd'hui, pas de pause de fin de
journée au soleil, nous nous enfermons dans notre nid
douillet.
Lundi 4 mai
Le marché de Forcalquier, est dit-on, le plus grand marché
de Provence. C'est vrai que nous nous y sommes promenés
deux heures, entre tissus colorés, poteries, savons de
Marseille, épices, olives, tapenade et légumes
du midi. Nous y avons acheté de ces délicieuses
asperges vertes que nous goûtons avec plaisir, à
chaque fois que nous descendons à Nîmes.
Volx
Après le déjeuner ensoleillé,
nous nous sommes rendus à Volx, petit bourg des derniers
contreforts du Luberon. Nous y avons flané deux bonnes
heures, depuis la place de la mairie, bâtisse ancienne
qui évoque la sérénité, jusqu'au
sommet du village ancien, découvrant tour à tour,
la Rue Louis Pasteur avec ses maisons pastels, le lavoir qui
chante sans fin, l'église Notre Dame de la Roche, la
tour carrée avec ses gargouilles et son campanile, la
Rue des Arcades, les ruelles qui escaladent la colline, la Rue
des Acacias émaillée d'iris aux couleurs surprenantes,
venelle agrémentée d'escaliers fleuris, qui débouche
sur la Rue des Remparts, en face d'un gros aloès et d'un
portail en fer forgé au delà duquel la vue s'étend
sur le canal de Manosque, la verte vallée et la roche
amère. Joli paysage... et petit clin d'oeil à
un ami qui m'avait indiqué cet endroit !
Encore plus haut, en longeant les remparts, on débouche
sur un carrefour, puis c'est la Rue du Château qui finit
au bord du ravin et découvre la montagne au delà
du vallon et plus près la place de la mairie. Nous redescendons
la ruelle et prenons la direction du rocher d'escalade, mais
après un petit bout de route pentue, nous rebroussons
chemin, nous attardant près des roses au parfum de pêche
de la Rue du Greffe, près des vieux murs de pierres piqués
d'aloès dressés vers le ciel azur, près
de la fontaine qui murmure à deux pas de l'église
dans laquelle un orgue pleure quelques notes. Nous remontons
ensuite en voiture et nous dirigeons vers le village voisin,
Dauphin.
dauphin
Nous voici à Dauphin, 445 mètres d'altitude, ça
monte toujours autant. Banon, Forcalquier, Volx, dures journées
pour nos jambes d'habitants des plaines normandes ! Rue de la
Croix du Collet... musique des mots... glycines, roses délicieusement
parfumées... Rue Torse, la bien-nommée puisqu'elle
tourne à 90 degrés, Rue de l'Eglise, autant d'étroites
venelles pavées de galets, qu'ici on appelle calades,
et au centre desquelles court un ruisseau central. La Grande
Rue n'a de grande que le nom et tout en haut, l'église
paisible avec son toit vert surveille l'ensemble du paysage.
De la terrasse toute proche, on découvre un panorama
superbe.
Rue du Pourcheirieu... une enfilade de voûtes se jouant
des contrastes d'ombre et de lumière, murs tapissés
de fleurs, pavés envahis d'herbes tendres. Nous prenons
notre temps, marchant à petits pas, photographiant ici,
filmant là, fleurant une rose, essayant un banc, profitant
de la fraîcheur des rues étroites. Quelle quiétude
!
En quittant Dauphin, la dernière image
qu'on retient, c'est à la sortie du village, la poste
en jaune et bleu avec son aspect vieillot et son abri-bus comme
figé dans le temps. Un peu plus loin, on franchit un
pont sur la Laye, et on retrouve le 20ème siècle.
De retour à la caravane, nous renouvelons l'idée
du barbecue et goûtons au célèbre fromage
de Banon.
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