Jeudi
19
Levés à 6 h 30, une heure plus tard nous sommes
sur le chemin de Hluhluwe situé à 275 kilomètres
de Durban, dans le Zululand. Notre voyage s'africanise. Apparaissent
des huttes dans la campagne, des animaux au bord de la nationale,
des gens qui portent leur fardeau sur la tête, des vendeurs
d'ananas postés sur les bas-côtés. Sur les
six derniers kilomètres, un chemin mouillé et
glissant nous amène à l'hôtel. Il est 11
h 15, nous avons bien roulé. Nous nous installons en
pleine nature, dans un lodge dont la conception diffère
de ceux que nous avions habités au Sénégal
ou au Kenya
et qui étaient de véritables petites maisons.
Celui-ci a deux murs et le sol en dur tandis que les deux autres
murs et le toit sont fabriqués dans une toile épaisse
soutenue par des armatures constituées de grosses poutres
en bois.
Après avoir photographié une
ribambelle d'oiseaux occupés à voleter dans un
champ couvert de nids, nous déjeunons au restaurant et
partons pour un safari avec un ranger, mais la pluie s'étant
mise de la partie, le chemin de terre devient boue, on a peu
de visibilité. Dans le quatre-quatre ouvert aux rafales
trempées, nous sommes six, équipés de ponchos
en caoutchouc qui descendent jusqu'aux pieds. Nous n'apercevons
que peu d'animaux, car le camion ne pouvant passer dans les
sentes de traverse, doit rester sur le chemin principal, déjà
profondément creusé d'ornières; ça
glisse, ça dérape, c'est le déluge. Nous
apercevrons quand même quelques antilopes, gazelles, girafes,
éléphants, zèbres, un phacochère,
un éléphanteau et un bébé gazelle
né le jour même... De retour plus tôt que
prévu puisque nous n'avons pu faire le parcours complet,
nous séchons les objectifs, l'appareil photo, sa sacoche,
le sac à dos et nous-mêmes à l'aide du sèche-cheveux
de la chambre. Et tandis que nous buvons un café tout
en bouquinant, le vent rageur et les giclées d'eau font
claquer la toile de notre "lodge-tente de safari".
Kilométrage du jour : 283 km
Vendredi
20
La pluie a cessé au petit matin sous un ciel encore lourd
de grisaille. Les chemins étant impraticables, le safari
de ce matin a été annulé, aussi dès
8 h 30 sommes-nous sur le départ. La route de terre qui
permet de quitter le lodge, défoncée et glissante,
s'agrémente de trous d'eau et de larges flaques qu'il
faut traverser au pas. Cependant, on a déjà vu
pire, au Costa
Rica par exemple quand nous roulions vers Oscional, la plage
où pondent les tortues.
La voiture, blanche au départ, est mouchetée de
marron et le bas de caisse couvert de boue. Après six
kilomètres, nous retrouvons la nationale 2 qui mène
vers le Swaziland, le plus petit pays de l'hémisphère
sud, enclavé entre l'Afrique du Sud et le Mozambique.
De nouveau, il tombe des cordes, ça n'en finit pas. A
Jozini, comme nous traversons le village encombré par
le marché et des véhicules dans tous les sens,
une voiture, pour quitter le bas-côté où
elle était garée, recule et emboutit notre portière
arrière-gauche. Nous avons la chance que le conducteur
accepte de venir au poste de police où nous passons une
grande heure à remplir le rapport qui devrait établir
sa responsabilité et nous éviter de perdre tout
ou partie de notre caution. Nous repartons avec un bout de papier
preuve de la déclaration d'accident dont la police conserve
le rapport.
Après quelques formalités rapides
à la frontière, nous entrons dans le Swaziland
sous une pluie battante... Flamboyants resplendissants, huttes
rondes en terre brune, maisonnettes rectangulaires et plates...
Dès que nous stoppons la voiture pour photographier une
case, une horde de gamins vient se coller aux vitres et on ne
voit plus rien. Il faut donc agir avec ruse, en repérant
de loin l'endroit, s'arrêter, photographier très
vite et repartir avant qu'ils n'aient eu le temps d'atteindre
la voiture.
Près de chaque maison rectangulaire, se dresse une hutte
ronde. Dans certains cas les deux constructions sont peintes
de la même couleur vive, orange, jaune, bleu clair...
La plupart du temps, elles sont couleur terre.
A 17 heures, nous atteignons le Forester Arms à 23 kilomètres
de Mbabane et il pleut toujours. Les lodges sont situés
dans un grand parc qui serait très agréable si
on pouvait sortir, mais avec ce qui tombe et l'humidité
ayant refroidi l'atmosphère (on est en montagne à
environ 1200 mètres d'altitude), nous n'avons guère
envie d'aller nous mouiller comme hier.
Ce soir, le restaurant nous accueille dans une ambiance chaleureuse,
avec un feu de bois au milieu de la pièce et un repas
raffiné comme l'étaient ceux du Rovos. Sur une
table, figurent deux étiquettes, la première porte
notre nom pour la réservation, la seconde indique le
nom de la jeune Swazi qui s'occupera de nous toute la soirée,
veillant à nous servir au mieux. La patronne vient nous
voir pour nous souhaiter la bienvenue et nous expliquer le déroulement
du repas. Plusieurs petits plats, choisis au fur et à
mesure de nos envies, se succèderont, apportés
par la jolie Swazi en costume local. Le café sera servi,
si nous le souhaitons, dans un salon attenant. De grands rideaux
colorés couvrent les fenêtres nous isolant un moment
du bruit de la pluie. Nous apprécions beaucoup ce dîner
et le moment paisible dans le salon voisin, lui aussi doté
d'un feu de bois et meublé de canapés confortables.
De retour dans la chambre, nous allumons le feu préparé
d'avance, plus pour l'ambiance que pour la chaleur. Dehors c'est
toujours le déluge, l'eau ruisselle sur la terrasse...
Kilométrage du jour : 345 km
Samedi
21
Accalmie de la pluie quand nous partons à 8 h 30 pour
le Kruger, malgré le ciel encore plombé et bas
! La voiture qui était couverte de boue hier soir, a
recouvré sa blancheur ce matin, un garçon de l'hôtel
est passé par là ! La route de montagne est belle,
on se croirait dans les Alpes, il pleut de nouveau mais pas
trop, nous pouvons descendre de voiture pour faire des photos.
Nous longeons une grosse rivière chargée de boue,
qui par endroits cascade en chutes bouillonnantes, les prairies
regorgent d'eau, des cailloux entraînés par les
eaux ruisselantes jonchent les côtés de la route,
les chemins de terre rouge mouillée tracent des sillons
sanglants dans le vert des herbes vives. En milieu de matinée,
le ciel se déverse sur nous de nouveau, pourtant le paysage
est magnifique, montagnes couvertes de rochers affleurant la
terre et baignés dans un océan de verdure, immenses
flaques d'eau dans les champs, vallonnements doux couverts de
cultures maraîchères, maisons traditionnelles émaillant
les coteaux... C'est la région de Piggs Peak ! Nous prenons
les photos à la sauvette, depuis la voiture en ouvrant
la vitre, ou vite fait dehors à travers les gouttes.
Un peu plus tard, nous nous arrêtons pour photographier
un village de cases et si les nuages nous permettent cette fois
de descendre de voiture, ce sont les gamins qui nous investissent.
Vêtus de haillons crasseux, ils jaillissent des maisons
et tendent la main.
C'est étonnant comme la terre est rouge
par ici, les flaques d'eau elles-mêmes semblent teintées
d'écarlate. Sur les versants, alternent les bandes vertes
des cultures et le rouge des terres fraîchement retournées,
jolie mosaïque naturelle.
Sur le bord de la route, les gens qui ont maintenant replié
leur parapluie, portent de gros ballots sur la tête. La
rivière Mlumati, alourdie des eaux de ruissellement,
s'étale, noyant d'ocre le pied des arbres. Nous approchons
de la frontière, nous avons quitté la haute montagne,
il fait plus chaud.
De retour en Afrique du Sud, nous gagnons Malelane, la porte
sud du parc Kruger. Le long de la route s'étirent des
kilomètres de bananeraies où comme dans d'autres
pays les régimes de bananes sont ensachés dans
de grands plastiques bleus. La végétation a changé
depuis que nous avons quitté les sapins de la montagne,
mais tout est toujours très vert. Nous arrivons au lodge
Pestana Kruger, situé dans un grand espace fleuri au
bord d'une rivière, à la porte Malelane du parc.
Kilométrage jusqu'au lodge : 198 km
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