Témoignages recueillis
au Sri Lanka
Notre guide nous raconte la surprise des habitants du pays qui
ne connaissaient pas ce phénomène et qui ont tous
été surpris par ce qui s'est passé, d'où
l'importance du nombre des victimes.
Lui-même est allé avec un car, le 28 décembre,
récupérer une trentaine de touristes de toutes
nationalités réfugiés depuis deux jours,
dans un temple bouddhiste près de Galles. Il lui a fallu
plus de 10 heures pour rejoindre la côte par l'intérieur,
la route côtière Colombo-Galles (environ 120 km)
étant coupée.
Dans le district d'Ampara, on recense au moins 12000 morts.
L'eau a envahi les terres sur 3 km. On parle de 6000 morts à
Galles, 4000 à Hambantota…
Dans le Yaka National Park, presque tous les touristes de l'hôtel
Triton (60 chambres) ont disparu à l'exception de cinq
ou six d'entre eux. Cet hôtel appartient à l'agence
Spencer, qui nous a fourni la voiture pour le circuit.
La vague a tout balayé. On a retrouvé aux Maldives,
des autobus emportés sur la côte du Sri Lanka.
Cette vague qui a atteint des hauteurs de 20 à 25 mètres
dans le sud (plus haute que les cocotiers), s'est fait sentir
jusqu'à Colombo, où elle mesurait encore 2 mètres.
Quelques hôtels et villages de pêcheurs ont été
touchés, par exemple à Mont Lavinia.
La première vague a arrêté un train qui
arrivait. C'est alors que tous les gens des environs qui avaient
été épargnés, se sont précipités
pour se mettre à l'abri à l'intérieur des
wagons. De ce fait, quand la 2ème vague a frappé,
il y a eu un nombre de victimes encore plus grand dans ce train.
On nous dit qu'au moins 12000 pêcheurs et leur famille
avaient disparu… Ce n'est pas un chiffre officiel, mais
c'est ce qui se dit dans le pays.
Quant à ceux qui restent, ils n'ont plus de bateaux.
Et de toute façon, personne ne veut plus manger de poisson.
La mer a tout avalé, y compris les gens, et on ne veut
pas manger de poissons, de crainte qu'ils ne se soient nourris
des morts.
Et pourquoi, s'interrogent les gens, n'a-t-on pas prévenu
la population par radio ou télévision de l'imminence
du danger, alors que là-bas, on se lève tôt
et on écoute la radio ou la télé le matin
?
Pourquoi, alors qu'on est entouré par la mer, ne nous
a-t-on jamais expliqué les tsunamis à l'école,
tandis qu'on nous a parlé de glaciers, de volcans, qui
n'existent pas sur notre île ?
Personne ne savait ce qu'était un tsunami, c'est pour
ça que les gens ne se sont pas échappés.
Curieux, ils sont restés à regarder après
la 1ère vague. Certains ont eu l'idée de fuir
et ont été sauvés, comme le chauffeur de
ce grand bonze, qui lui au contraire, est mort noyé parce
que, pensant que c'était fini, il est resté sur
place.
Les gens n'avaient jamais rien lu sur les tsunamis, ni entendu
parler de ce phénomène. Ils n'avaient même
pas de mot pour le désigner. Aujourd'hui, ils en ont
un, c'est le mot : tsunami !
Maintenant, le gouvernement va interdire de reconstruire à
moins de 100 mètres de la plage. Mais c'était
déjà interdit avant et ça s'est fait quand
même. Les pêcheurs veulent rester près de
la mer à cause de leur matériel de pêche,
alors on parle de leur construire des entrepôts au bord
de l'eau pour remiser les filets et les bateaux et de reconstruire
les maisons à 100 mètres en arrière. Mais
c'est si peu!
Ce sont les Cinghalais qui les premiers ont porté secours,
recueilli et aidé les sinistrés survivants. Ils
les ont nourris, habillés, abrités, en attendant
l'aide internationale.
Maintenant, notre guide et quelques autres vont collecter des
fonds et mettre au point un projet d'aide pour le nord-est.
Ils envisagent de financer la construction d'une salle pour
l'école.
A l'est la plupart des victimes sont des Tamouls du Sri Lanka.
Il est très dangereux de se rendre dans cette région,
car la mer a déterré et déplacé
les mines qui étaient encore en place malgré le
cessez-le-feu, signé en 2002, entre le parti LTTE et
le gouvernement de Colombo.
Au moins le pays a-t-il eu la chance de ne pas connaître
d'épidémies, parce que les morts ont été
enterrés en trois jours. Des familles entières
ayant été décimées, il n'y avait
plus personne pour réclamer les corps. |